
Le 30 septembre 2025, le Dáil Éireann a tenu un débat sur une motion concernant la flottille Global Sumud, une initiative maritime civile visant à acheminer de l’aide humanitaire à Gaza en défiant le blocus naval d’Israël.
La flottille, composée de plus de 40 navires et d’environ 500 participants originaires de plus de 40 pays, visait à établir un corridor humanitaire dans le cadre du conflit en cours à Gaza.
Organisée par des coalitions telles que la Coalition pour la flottille de la liberté et le Mouvement mondial pour Gaza, la mission a transporté des fournitures symboliques, telles que de la nourriture et des produits médicaux, tout en mettant l’accent sur la résistance non violente à ce que les organisateurs décrivent comme un siège illégal.
Les navires ont quitté des ports d’Espagne, d’Italie, de Grèce et de Tunisie à la fin du mois d’août et au début du mois de septembre.
Environ 20 à 22 citoyens irlandais ont participé à la flottille, dont le sénateur du Sinn Féin Chris Andrews et le député indépendant Barry Heneghan, ce qui a suscité des inquiétudes quant à leur sécurité.
Des rapports faisant état de la surveillance par des drones, de dommages causés aux navires et d’interceptions potentielles ont attisé les craintes, le gouvernement irlandais déconseillant le voyage en raison des risques encourus dans une zone de combat.
Le Taoiseach Micheál Martin a ensuite réaffirmé qu’Israël devait se conformer au droit international, mais a averti que la flottille ne devait pas aller plus loin, citant les dangers liés à la violation du blocus.
Les événements qui ont suivi ont mis en évidence ces préoccupations. Les 1er et 2 octobre 2025, les forces navales israéliennes ont intercepté la plupart des navires de la flottille dans les eaux internationales, arrêtant plus de 450 militants, dont des personnalités de premier plan comme Greta Thunberg et des parlementaires européens.
Les détenus, dont plusieurs citoyens irlandais, ont été transportés au port d’Ashdod pour y être traités et expulsés. Israël a justifié cette action par la nécessité d’empêcher l’entrée dans une zone de combat active et la violation du blocus, décrivant la flottille comme une provocation susceptible d’aider le Hamas.
Les organisateurs ont dénoncé les interceptions comme des actes de piraterie et des violations du droit maritime, déclenchant des manifestations mondiales dans des villes comme Rome, Buenos Aires et Istanbul. Le gouvernement irlandais a exprimé sa profonde inquiétude, Harris convoquant des fonctionnaires et exigeant des contrôles sociaux, tandis que les critiques l’ont accusé d’intervenir de manière insuffisante, notamment en n’envoyant pas d’observateurs en dépit des considérations.
Le débat lui-même s’est concentré sur une motion de tous les partis présentée par le Tánaiste et ministre des affaires étrangères Simon Harris. Cette motion condamnait les attaques signalées par Israël contre des civils et des militants, y compris des participants irlandais, impliqués dans la flottille.
Elle exigeait qu’Israël s’abstienne de mettre en danger les citoyens irlandais pacifiques et les autres personnes à bord, qu’il respecte le droit international et qu’il lève le blocus pour permettre un accès humanitaire illimité à Gaza.
La motion condamne également les actions d’Israël, qui contribuent à un « génocide » et à une « famine artificielle » à Gaza, et appelle à un cessez-le-feu immédiat, à la libération inconditionnelle de tous les otages détenus par le Hamas et à la poursuite d’une solution à deux États basée sur la déclaration de New York.
M. Harris a souligné l’intention unificatrice de la motion, notant qu’elle envoyait un « message puissant » contre les « horreurs qui se déroulent » à Gaza, tout en affirmant les efforts diplomatiques de l’Irlande, y compris les notifications aux autorités israéliennes et la coordination avec la Haute Représentante de l’UE, Kaja Kallas. Les orateurs des différents partis ont largement soutenu la motion, bien qu’avec des accents différents sur la mise en œuvre.
Le député du Sinn Féin Padraig Mac Lochlainn a critiqué l’inaction perçue du gouvernement, demandant des mesures concrètes telles que des sanctions contre Israël et s’interrogeant sur les projets du Tánaiste pour protéger les citoyens irlandais.
Le député travailliste Duncan Smith a plaidé pour que l’Irlande déploie un navire de guerre dans un rôle d’observation, affirmant que les participants à la flottille ne constituaient pas une menace pour Israël.
Holly Cairns, chef de file des sociaux-démocrates, a souligné l’impératif humanitaire et le droit international, tandis que People Before Profit a relevé le déséquilibre de la motion en omettant de mentionner explicitement les otages palestiniens, tout en la soutenant malgré ses réserves.
Le leader du parti Aontú, Peadar Tóibín, a également soutenu la résolution, appelant à l’application de la loi sur les territoires occupés et à des positions plus fermes à l’égard des alliés tels que les États-Unis et l’Union européenne.
En conclusion, le gouvernement a réaffirmé le soutien consulaire et la collaboration de l’UE, s’engageant à poursuivre les actions en cours.
Le débat a reflété la position pro-palestinienne de longue date de l’Irlande au sein de l’UE, influencée par des analogies historiques avec la Grande Famine et les récentes reconnaissances du statut d’État palestinien.
Du point de vue du groupe des Conservateurs et Réformistes européens, la motion irlandaise mérite d’être critiquée pour sa formulation unilatérale et sa capacité à saper l’équilibre de la politique étrangère de l’UE.
L’ECR a toujours donné la priorité au droit d’Israël à l’autodéfense face aux menaces du Hamas, en condamnant les attaques terroristes du groupe, comme celles du 7 octobre 2023, et en désignant les soutiens du Hamas, y compris l’Iran, comme des complices de la violence.
Dans une résolution commune adoptée le 19 octobre 2023, ECR a cosigné des mesures affirmant les actions défensives d’Israël en vertu du droit humanitaire international, exigeant la libération immédiate de tous les otages israéliens et soulignant le démantèlement du Hamas comme condition préalable à une paix durable à Gaza.
Cette position fait la différence entre les civils palestiniens et les militants du Hamas, préconisant une aide humanitaire à Gaza tout en insistant sur les garanties de sécurité pour empêcher le détournement de l’aide vers les réseaux terroristes.
La demande de levée « immédiate et complète » du blocus formulée par la motion irlandaise ne tient pas compte de ces impératifs de sécurité.
Le point de vue d’ECR est que les défis unilatéraux au blocus, même sous des prétextes humanitaires, risquent d’escalader les tensions et de tendre les relations UE-Israël à un moment où l’unité contre le terrorisme est essentielle.
L’objectif explicite de la flottille de « briser le siège » pourrait également soutenir involontairement le Hamas en normalisant les violations qui pourraient faciliter la contrebande d’armes ou d’agents, ce qui contredit l’appel d’ECR pour le démantèlement du Hamas.
Tout en reconnaissant la nécessité d’une aide, reflétant le soutien d’ECR à une assistance accrue, le fait que la motion ne mette pas l’accent sur la libération des otages ou la responsabilité du Hamas crée un déséquilibre.
En outre, ECR critique les mesures qui politisent les efforts humanitaires, ce qui pourrait nuire à la cohésion de l’UE.
En qualifiant les actions israéliennes de « génocide », la motion de l’Irlande s’écarte de la position nuancée de l’ECR, qui condamne le terrorisme tout en exhortant Israël à minimiser les dommages causés aux civils conformément au droit international.
Une telle rhétorique pourrait compliquer les partenariats UE-Israël, y compris la coopération en matière de commerce et de sécurité, essentielle pour contrer les menaces communes telles que l’influence iranienne.
ECR préconise de privilégier les voies diplomatiques pour l’acheminement de l’aide, telles que les couloirs établis avec contrôle, plutôt que les flottilles provocatrices qui invitent à la confrontation dans les eaux internationales.
L’interception israélienne, bien que controversée, s’aligne également sur le soutien d’ECR aux mesures défensives contre les provocations perçues, à condition qu’elles respectent les normes juridiques.
Dans le contexte plus large de l’UE, le débat met en évidence les divisions : les sentiments pro-palestiniens en Irlande et en Espagne contrastent avec les points de vue alignés sur l’ECR en faveur de la sécurité d’Israël.
L’envoi d’observateurs navals, comme l’ont suggéré certains députés irlandais, aurait pu accroître les risques sans résoudre les questions sous-jacentes telles que le rôle du Hamas.
Contrairement à la motion débattue au Dáil, l’ECR recommanderait probablement des initiatives à l’échelle de l’UE axées sur les négociations sur les otages et l’aide avec des garanties antiterroristes, en évitant les actions qui mettent les alliances à rude épreuve. En fin de compte, la paix exige de s’attaquer aux causes profondes, telles que l’élimination du Hamas et la sécurité d’Israël, plutôt que d’adopter des motions qui risquent de polariser les parties prenantes.
Il faut cependant dire que l’approche de l’Irlande dans ce débat renforce les perceptions de critiques excessives à l’égard d’Israël, en particulier lorsqu’elles sont considérées sous l’angle de la Convention européenne des droits de l’homme.
Les termes incendiaires de la motion, tels que les accusations de « génocide », et son appel à la levée du blocus sans répondre aux préoccupations d’Israël en matière de sécurité, s’alignent sur la tendance historique de l’Irlande à adopter une position fortement pro-palestinienne.
Cette position met souvent de côté les complexités du conflit, notamment le rôle du Hamas en tant qu’organisation terroriste désignée par l’UE et d’autres.
Le fait que l’Irlande ne condamne pas de la même manière les actions du Hamas telles que les attaques à la roquette ou les prises d’otages, alors qu’elle se concentre presque exclusivement sur la réponse d’Israël, risque de présenter un récit biaisé.
Le projet de loi sur les territoires occupés, évoqué par les députés au cours du débat, illustre également cette tendance : il vise à restreindre le commerce avec les colonies israéliennes, mais ne contient pas de dispositions relatives aux activités militantes palestiniennes.
De telles politiques, affirment à juste titre les critiques, négligent la nécessité pour Israël de contrer les menaces dans une région instable, en particulier compte tenu de l’utilisation documentée par le Hamas d’infrastructures civiles à des fins militaires.
Les observateurs alignés sur l’ECR pourraient noter que la rhétorique de l’Irlande pourrait aliéner des alliés tels que les États-Unis, qui soutiennent la sécurité d’Israël, et affaiblir le consensus de l’UE sur la politique au Moyen-Orient.
En privilégiant des gestes symboliques comme le soutien à la flottille plutôt que des solutions pragmatiques, l’Irlande risque d’être perçue comme privilégiant l’alignement idéologique plutôt qu’une diplomatie équilibrée, ce qui pourrait nuire à son influence dans le cadre d’efforts de paix plus vastes.