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Le document stratégique de Trump défie l’Europe

Le monde - décembre 11, 2025

L’administration américaine a publié un nouveau document stratégique sur la politique de sécurité. Et comme c’est la superpuissance dominante du monde qui est en jeu, le document contient également plusieurs considérations concernant l’Europe et l’UE.

De nombreux hommes politiques et leaders d’opinion en Europe ont été consternés par les vives critiques adressées à l’Union européenne dans le document. « L’Union européenne et d’autres organismes transnationaux […] sapent la liberté politique et la souveraineté » des pays européens, affirme notamment le document.

La critique est que le supranationalisme affaiblit la souveraineté des États membres. La libre formation des opinions est également entravée par la censure et le politiquement correct. Mais il s’agit aussi du fait que les pays européens – surtout en Europe de l’Ouest – ont autorisé trop d’immigration. Selon les auteurs du document, l’immigration de masse presque incontrôlée a déstabilisé l’Europe, détruit les marchés du travail et rendu les pays européens plus vulnérables à l’influence des puissances étrangères.

En Europe, les principaux responsables politiques ont jusqu’à présent fait preuve de retenue dans leurs réactions. Le journal français Le Monde note que les dirigeants européens ont fait profil bas afin de ne pas renforcer la division entre l’Europe et les États-Unis. Lundi 8 décembre, les dirigeants britanniques, français et allemands se sont retrouvés à Londres pour discuter des derniers développements diplomatiques autour de la guerre en Ukraine, mais aussi du nouveau document stratégique des Etats-Unis. Ils ont choisi de ne pas commenter la nouvelle doctrine américaine.

Cependant, les journalistes et les leaders d’opinion n’ont pas été aussi modérés. Le commentateur géopolitique de Radio France, Pierre Haski, estime dans une tribune publiée le 8 décembre que les Etats-Unis s’allient désormais à l’extrême droite européenne et que cette nouvelle stratégie signifie que les Etats-Unis rompent désormais leurs relations normales et fonctionnelles avec l’Europe.

En Suède, l’éditorialiste Peter Wennblad a écrit dans le quotidien libéral-conservateur Svenska Dagbladet que l’Europe doit désormais se battre sur deux fronts. Nous devons faire face à une Russie agressive, mais aussi à des États-Unis hostiles.

De nombreuses critiques en Europe établissent un lien entre le contenu du document et la situation actuelle en Ukraine. Ils estiment que l’administration Trump affaiblit son soutien à l’Ukraine, à l’Europe et au monde libre lorsqu’elle suggère que l’Europe aurait dû négocier la paix en Ukraine il y a longtemps. Ils estiment également que l’administration américaine actuellement au pouvoir à Washington est aveuglée par un certain degré de sympathie pour la Russie.

Il est vrai que la Russie n’est plus présentée comme une menace pour les États-Unis dans la nouvelle doctrine de politique de sécurité. Le document parle beaucoup plus de la Chine que de la Russie. Et l’attitude fondamentale des États-Unis semble être de se concentrer sur leurs propres intérêts et donc sur l' »hémisphère occidental », c’est-à-dire l’Amérique du Nord et du Sud et les océans jusqu’à l’Asie. Les Européens eux-mêmes doivent gérer leurs différends avec la Russie.

Il est évident que le point de vue actuel des États-Unis sur la Russie et le conflit de l’Europe occidentale avec la Russie est ambivalent. D’une part, ils aiment minimiser la menace que représente la Russie. Trump choisit de parler à Poutine et semble croire que Poutine est intéressé par la création de la paix, ce que les Européens essaient de faire comprendre à Trump que Poutine ne l’est pas.

Dans le même temps, il est évident que les Américains incitent les Européens à cultiver leur propre force. « Nous voulons que l’Europe reste européenne, qu’elle retrouve sa confiance en elle en tant que civilisation », peut-on lire dans le document. Et ils invitent les Européens à investir encore plus d’argent dans leur propre défense. D’une certaine manière, l’actuelle administration américaine exhorte donc les Européens à redevenir grands et forts afin de ne plus avoir à craindre la Russie.

La critique de l’UE est plus claire. L’UE n’est décrite que comme une organisation supranationale qui entrave la démocratie et freine l’économie. Il est compréhensible que de nombreux dirigeants européens réagissent.

Nous pouvons tous avoir des opinions différentes sur la question de savoir si Trump a raison ou tort. En outre, il peut avoir raison sur certains points et tort sur d’autres. Mais il ne fait aucun doute que Trump a une fois de plus irrité de nombreux Européens et que sa présidence constitue un véritable test pour le leadership européen.