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Le plan en trois phases de l’Europe pour mettre fin à la dépendance au gaz russe

Énergie - octobre 25, 2025

Bruxelles approuve une interdiction progressive des importations de gaz et de GNL russes d’ici à 2028, malgré l’opposition farouche de la Hongrie et de la Slovaquie

L’Union européenne a franchi une étape décisive pour mettre fin à sa dépendance à l’égard de l’énergie russe. Le Conseil de l’Union européenne est parvenu à un accord sur une proposition réglementaire qui prévoit l’arrêt progressif des importations de gaz naturel et de gaz naturel liquéfié (GNL) russes à partir de 2026. Le plan, divisé en trois étapes, constitue la pierre angulaire de la stratégie REPowerEU, la feuille de route conçue pour éliminer la dépendance à l’égard des combustibles fossiles russes à la suite de la militarisation de l’approvisionnement en énergie par Moscou pendant la guerre en Ukraine.

Une stratégie de sortie en trois étapes

Le plan de retrait progressif débutera le 1er janvier 2026, date à laquelle les États membres de l’UE ne seront plus autorisés à signer de nouveaux contrats pour le gaz russe ou le GNL. La deuxième étape, qui prendra effet le 17 juin 2026, mettra fin aux accords à court terme existants. Enfin, d’ici le 1er janvier 2028, tous les contrats à long terme seront entièrement supprimés.

Selon le texte approuvé à Bruxelles, les modifications des contrats existants ne seront autorisées qu’à des fins opérationnelles strictement définies et ne pourront pas se traduire par une augmentation des volumes. Certaines exceptions seront toutefois accordées aux pays enclavés ou à ceux qui ont récemment subi des perturbations de leurs voies d’approvisionnement, ce qui permettra une flexibilité limitée pour maintenir la sécurité énergétique pendant la transition.

Les voix dissidentes : Hongrie et Slovaquie

Si la quasi-totalité des États membres ont approuvé le plan, la Hongrie et la Slovaquie s’y sont fermement opposées. Ces deux pays dépendent fortement des importations d’énergie russe et affirment que le règlement constitue une menace directe pour leur sécurité énergétique et leurs économies nationales.

Le ministre hongrois des affaires étrangères, Péter Szijjártó, a exprimé de vives critiques, qualifiant la décision de l’UE de « sentence de mort pour la sécurité énergétique de la Hongrie ». Il a souligné que les réalités géographiques et les infrastructures existantes ne laissaient à la Hongrie que peu d’alternatives viables à court terme. « Pour nous, l’approvisionnement en énergie est une question de réalité physique, pas de politique », a déclaré M. Szijjártó, avertissant que l’approche de l’UE ignore les vulnérabilités uniques des nations d’Europe centrale.

De même, la Slovaquie s’est inquiétée du fait que la transition imposerait de lourdes charges économiques et pourrait mettre en péril la production industrielle, en particulier dans les secteurs dépendant d’une énergie abordable.

Un contexte plus large : Réduire les revenus de guerre de Moscou

L’embargo progressif de l’UE sur le gaz russe n’est pas seulement une politique énergétique, c’est une déclaration géopolitique. En réduisant systématiquement les importations, Bruxelles vise à priver Moscou d’une source de revenus essentielle qui finance depuis longtemps les efforts de guerre du Kremlin en Ukraine.

La déclaration du Conseil décrit la proposition comme « un élément central de la feuille de route REPowerEU visant à mettre fin à la dépendance de l’UE à l’égard de l’énergie russe ». Elle rappelle les interruptions répétées et les manipulations de l’approvisionnement en gaz par la Russie depuis 2022, qui ont eu des effets déstabilisateurs importants sur les marchés européens de l’énergie.

Plans nationaux de diversification

En vertu du nouveau règlement, tous les États membres de l’UE devront présenter des plans nationaux de diversification. Ces documents doivent décrire la stratégie, les défis et les mesures de chaque pays pour passer du gaz russe à d’autres sources, notamment les énergies renouvelables, l’augmentation des importations de GNL en provenance d’autres partenaires et le renforcement des interconnexions entre les États membres.

Les pays capables de prouver qu’ils ne reçoivent plus de gaz russe, directement ou indirectement, seront exemptés de certaines obligations. Les autres devront toutefois continuer à faire la preuve de progrès concrets en vue de mettre fin aux importations d’énergie russe d’ici l’échéance de 2028.

Règles simplifiées en matière de douane et de contrôle

Par rapport à la proposition initiale de la Commission européenne, le Conseil a introduit des procédures douanières simplifiées pour le gaz non russe. Les importateurs ne devront désormais soumettre des informations aux autorités compétentes qu’avant que le gaz n’entre sur le territoire douanier de l’UE. En revanche, le gaz russe restera soumis à des obligations d’information plus strictes pendant la phase de transition, notamment en ce qui concerne les volumes et les durées des contrats, ainsi que les modifications éventuelles.

Une rupture définitive avec l’énergie russe

La décision de l’UE est plus qu’un nouveau train de sanctions. Comme l’a fait remarquer le ministre danois de l’énergie et du climat, Lars Aagaard, le règlement représente « le cœur de notre opposition au gaz russe ». Il a souligné que si les sanctions peuvent compléter cette démarche, le nouveau cadre établit un changement structurel permanent : même si la paix est rétablie en Ukraine, l’UE ne reviendra pas aux importations d’énergie russe.

Faisant écho à ce sentiment, le commissaire européen Dan Jørgensen a qualifié cette mesure de « signal très, très important ». Selon lui, l’Europe ne cherche pas simplement à obtenir une indépendance temporaire vis-à-vis de Moscou, mais elle s’engage à s’affranchir des combustibles fossiles russes dans l’avenir.

En substance, le plan en trois phases de l’UE marque la fin d’un chapitre historique. Après des décennies de dépendance à l’égard de l’énergie russe, l’Europe s’engage définitivement sur la voie de la diversification, de la résilience et de l’autonomie stratégique, même au prix de difficultés à court terme pour certains États membres.

 

Alessandro Fiorentino